Connaissances des EEE végétales

Bilan des espèces introduites à la Martinique

Les invasions biologiques sont maintenant considérées comme l’une des principales causes d’appauvrissement de la biodiversité après la destruction des habitats. Les îles, au fort taux d’endémisme, sont particulièrement vulnérables à l’introduction d’espèces exogènes. Par ailleurs, la Martinique est soumise à une occurrence élevée de catastrophes naturelles, qui en perturbant les milieux, peut favoriser la propagation des EEE.

La flore présente en Martinique est composée de 3000 espèces dont environ la moitié sont exotiques. On peut citer comme exemple le Cocotier (Cocos nucifera), le Noni (Morinda citrifolia), le Glyseria (Gliricidia sepium) et le Mahogany petites feuilles (Swietenia mahagoni). Parmi ces espèces exotiques, environ 80 sont des EEE.

Certaines sont présentes sur le territoire depuis très longtemps comme le bambou commun (Bambusa vulgaris) introduit au XIXe siècle. Ces EEE ont été introduites soit de manière accidentelle (graines transportées par de la terre sur des chaussures) soit volontaire pour un usage médicinal, pour produire des ressources (bois, miel etc..) ou tout simplement pour leurs attraits esthétiques.

Les conséquences des EEE végétales sont multiples. Elles peuvent être d’ordre écologique  : perturbation de la pollinisation, altération du fonctionnement des cycles biogéochimiques (cycle de l’azote et du phosphore notamment), eutrophisation des eaux et diminution de la biodiversité par élimination des espèces les moins compétitives. Dans l’état actuel des connaissances, il est quasiment impossible de prévoir quelles seraient les conséquences à long terme de l’élimination de quelques espèces d’un écosystème. Il est possible que l’extinction d’une seule espèce, jouant un rôle déterminant, puisse compromettre la pérennité d’un écosystème en altérant les mécanismes d’autoéquilibre qui assurent son fonctionnement.

A plus grande échelle, on assiste à une uniformisation générale des peuplements et des paysages dues aux EEE (exemple du cocotier et du flamboyant). Enfin, les EEE végétales peuvent avoir des impacts économiques : prolifération dans les zones agricoles, envahissement des retenues d’eau rendues inutilisables ; et/ou sanitaires (allergies, caractère toxique).

Les EEE problématiques

Parmi les EEE les plus problématiques, on peut citer la Petite citronnelle (Triphasia trifolia), présente dans les forêts sèches du sud de la Martinique, la Langue de belle-mère (Sansevieria hyacinthoides), la Sonde (Tradescantia spathacea), la Jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes) qui colonise les rivières et retenues et Miconia calvescens, espèce plutôt inféodée aux milieux frais sur la partie nord du territoire.

Sonde (<i>Tradescantia spathacea</i>)
Sonde (<i>Tradescantia spathacea</i>)
Petite citronnelle (<i>Triphasia trifolia</i>)
Petite citronnelle (<i>Triphasia trifolia</i>)
Langue de belle-mère (<i>Sansevieria hyacinthoides</i>)
Langue de belle-mère (<i>Sansevieria hyacinthoides</i>)
  • Les EEE aquatiques

On en dénombre 4 : Jacinthe d’eau, Laitue d’eau, Hydrille verticillée et Salvinie géante.

Jacinthe d'eau (<i>Eichhornia crassipes</i>)
Jacinthe d'eau (<i>Eichhornia crassipes</i>)
Laitue d'eau (<i>Pistia stratiotes</i>)
Laitue d'eau (<i>Pistia stratiotes</i>)
Salvinie géante (<i>Salvinia molesta</i>)
Salvinie géante (<i>Salvinia molesta</i>)
Hydrille verticillée (<i>Hydrilla verticillata</i>)
Hydrille verticillée (<i>Hydrilla verticillata</i>)

Dans le cadre d’une actualisation des connaissances sur la flore dulçaquicole exotique envahissante, la Société d’Histoire Naturelle L’Herminier (SHNLH, Nantes) et la Direction de l’Environnement, de l’ Aménagement et du Logement (DEAL) ont engagé un inventaire visant à établir une liste des plantes dulçaquicoles exotiques envahissantes et préciser leur répartition, pour tenter de dresser un état de l’envahissement des écosystèmes aquatiques par cette flore. Cet inventaire s’intègre dans le programme de lutte contre les espèces exotiques envahissantes terrestres et marines dans les départements et collectivités d’outre-mer, de la Stratégie nationale pour la Biodiversité.

  • Les EEE ornementales

Beaucoup d’espèces réputées pour leur beauté sont des espèces exotiques envahissantes. Ces espèces, "échappées des jardins", et très appréciées du grand public, peuvent coloniser le milieu naturel et former des fourrés monospécifiques, dommageables pour les espèces indigènes. On peut citer comme exemple la liane mauve (Thunbergia grandiflora), très présente dans le nord, qui recouvre et étouffe les habitats indigènes.

Une EEE préoccupante : Miconia calvescens

Miconia calvescens est originaire du Mexique et fait partie de la famille des Melastomatacées. Il est appelé « Cancert vert » en Polynésie française où il a provoqué la disparition de la forêt locale au profit d’un couvert arboré monospécifique.

En Martinique, cette espèce a été introduite fin des années 80, dans le Jardin des Ombrages à Ajoupa-Bouillon en raison de ses caractéristiques ornementales. En 2017, des individus de Miconia calvescens ont été observés dans le milieu naturel, l’abandon du Jardin des Ombrages et le cyclone Dean ayant favorisé son expansion. Cette espèce a également été détectée sur les berges de la rivière Falaise.

Un chantier de lutte a été mené en 2018 sur cette espèce par l’ONF au niveau du Jardin des Ombrages. L’effort de lutte reste à poursuivre sur ce secteur, ainsi que sur celui de la rivière Falaise. Malheureusement, cette espèce est présente également au Morne Rouge et a été détectée en 2020 au Gros Morne.

Pour apprendre à reconnaître Miconia calvescens et découvrir les bons réflexes à avoir si vous l’observez, consultez cette

Guide des espèces végétales exotiques envahissantes de Martinique

Face à la menace que représentent les EEE végétales, la DEAL, en collaboration avec l’ONF et le Conservatoire botanique national de Martinique, a réalisé un guide. L’objectif est de sensibiliser aussi bien le grand public que les gestionnaires à la problématique et d’apporter des solutions concrètes de techniques de lutte et de gestion des déchets pour 25 EEE.

La valorisation des plantes locales dans les aménagements

Au niveau ornemental, on assiste à une homogénéisation de la flore de la ceinture intertropicale. Que l’on soit en Martinique, à Mayotte ou à Tahiti, on retrouve le flamboyant (Delonix regia), l’arbre du voyageur (Ravenala madagascariensis), la trompette d’or (Allamanda cathartica), le ti’flamboyant (Caesalpinia pulcherrima) ou encore l’amandier pays (Terminalia catappa).

Avec pour objectif de valoriser la flore locale, la DEAL a réalisé un guide pour les aménageurs. Ce travail vise plusieurs objectifs : le premier consiste à inciter à utiliser davantage la flore native qui participe à l’identité culturelle antillaise ; le second, du point de vue paysager, incite à la diversité plutôt qu’à l’uniformisation ; le troisième est d’ordre écologique car la diversité favorise l’adaptation aux changements.

Enfin cet ouvrage présente des espèces alternatives aux EEE désormais interdites par la réglementation.

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